2020, année 0 pour les "droits de l'Homme en Argentine
Le 15 décembre 2019, Mario Sandoval était extradé de la France vers
l’Argentine. Son arrivée le lendemain à l’aéroport de Buenos Aires, où il était
encadré par des forces de police argentines triomphales et surarmées, dans une
mise en scène savamment orchestrée pour les médias locaux, donnait le ton de ce
qui l’attendait.
Alors que son état de santé était notoirement incompatible avec un
interrogatoire ou la moindre déclaration, (et après un voyage éprouvant où il
était maintenu en permanence menotté), il a été immédiatement présenté au juge
argentin en charge de “l’instruction”. Celle-ci était de toutes façons déjà
rédigée de longue date, et il ne manquait plus que quelques espaces blancs à
compléter par ce dernier, qui, comme attendu, clôturait ainsi l’affaire à
charge, puisqu’elle était déjà entendue. Nul besoin de l’auditionner, puisqu’il
était coupable. Et ce alors qu’il n’a cessé de demander à être entendu, et
s’est toujours tenu à la disposition de la justice.
Il faut dire que le “procès” de Mario Sandoval avait commencé il y a déjà
11 ans, par un article absurde publié par la “Pravda” argentine, repris par
tous les « témoins » dans leurs dépositions, et par le juge. Inutile
donc de l’auditionner ou de se perdre dans un travail d’investigation, puisque
tout avait déjà été dit. Il ne manquait que son arrestation, puisqu’il était
déjà coupable. Mario Sandoval a été jugé et condamné par la vox “justicialiste”
et “kirchneriste”, avant même son arrestation.
Dès lors que celle-ci a été obtenue, seule la prison l’attendait. Le
reste était superflu. Le respect du droit, de la présomption d’innocence, un
dossier vide et l’absence de preuves, pour quoi s’embarrasser ? Pour la
justice « justicialiste » aux ordres (ou « légitime »,
selon la terminologie choisit par ces juges militants), Il suffit de désigner
un homme pour en faire un coupable, et de répéter un mensonge pour en faire une
vérité, reprise à l’envie par des ONG complices. Bienvenue dans l’ère de la
post-vérité politico-judiciaire. Comme dans « Le procès » de Kafka[i],
où la propriétaire de la pension logeant Joseph K, lui déclare « (…) je
sais bien que vous êtes arrêté, mais ce n’est pas comme on arrête les voleurs.
Quand on est arrêté comme un voleur, c’est grave, tandis que votre
arrestation…elle me fait l’impression de quelque chose de savant que je ne
comprends pas ». Ce à quoi Joseph K répond : « ce n’est
pas seulement quelque chose de savant, c’est un néant ridicule ». Nous
sommes dans la néant ridicule, qui vous anéantit justement car vous ne pouvez
pas lutter contre lui. Il n’y a pas de prise sur le néant, ni de remède pour
lutter contre l’arbitraire absurde.
Sur Mario Sandoval, tout a été dit, écrit. Sauf la vérité. Les militants péronistes
et membres des organisations terroristes argentines d’hier sont des experts de
la manipulation des faits et de l’instrumentalisation de la justice. Après avoir réécris l’histoire comme elle
leur convenait, ils se sont réinventés en « jeunes idéalistes » qui
luttaient contre la dictature, effaçant ainsi d’un trait leurs crimes atroces
perpétués sous la démocratie, et leur gout immodéré pour la violence.
Aujourd’hui, après avoir expurgé de la justice tous ceux qui ne partageaient
pas leur projet de judiciarisation du passé (et après avoir pris soin de
s’exonérer eux-mêmes de toutes poursuites), ils sont devenus de grands
défenseurs des droits de l’Homme. Enfin, défenseurs des leurs avant tout. Ce
qui ne les empêche pas en 2020 de continuer à exalter la violence politique et d’attaquer
les institutions de la République argentine, dès lors qu’elles ne vont pas dans
le sens qu’ils souhaitent, ou menacent l’impunité de l’un des leurs.
En un an, que s’est-il passé ? Rien, le néant, année zéro du droit, de la
vérité, de la justice, du respect à la présomption d’innocence, une année pour
rien. Qui rendra compte de ce temps volé injustement à un homme, en détention
arbitraire loin de son pays et de sa famille? 2020 n’aura servi à rien
d’autre qu’à priver Mario Sandoval arbitrairement de sa liberté, alors que
toutes les conditions étaient réunies pour qu’il puisse être maintenu en
liberté en attendant son procès si procès il devait y avoir. Il a été mis en
examen de façon bâclée, sans avoir jamais été entendu, ni confronté à ses
détracteurs, et alors qu’aucune investigation n’a eu lieu. Dans l’Argentine
péroniste de 2020, le pouvoir judiciaire aux ordres ne s’embarrasse guère de ces actes
insignifiants avant de juger ou condamner un homme pour crimes contre
l’humanité. Nul besoin de preuves, de confrontation avec les
« témoins », dont la seule parole 40 ans après les faits supposés suffit
à vous identifier comme « tortionnaire » ou « répresseur ».
De quoi cette « justice-là » est-elle le nom ?
Pendant que ces juges-là font et défont la vie des prisonniers politiques et
de leurs familles, plus de 600 d’entre eux sont décédés, en attendant leur
procès. Qui se soucie de ces arrestations arbitraires et de ces prisonniers
politiques en détention provisoire éternelle, dont la moyenne d’âge est de 75
ans? Qui se soucie des morts du Covid 19 en détention, sans avoir pu revoir les
siens, et après s’être fait refuser l’aménagement d’une peine ou la liberté
provisoire à laquelle ils pouvaient légitimement prétendre ?
Pendant ce temps, bien sûr, les prisonniers proches du pouvoir, accusés de
corruption et autres indélicatesses, ont eux été massivement libérés. La
justice aux ordres du «justicialisme», voilà le maître mot du « péronisme ».
Cette célèbre phrase du Général Péron « à l’ennemi, rien, ni la justice, à
l’ami, tout », résume bien la situation. Pour la communauté
internationale, on met en avant le beau programme « Mémoire, justice et
vérité », pour justifier la pseudo-légitimité de ces procès pour crimes
contre l’humanité, en dehors de toute légalité. Mais la réalité et le résultat est
tout autre : cette mise en scène ne recherche ni la vérité, ni la justice,
et a tout à voir avec une mémoire partiale, où les héros sont les terroristes
d’hier.
Dans un pays en crise, le gouvernement péroniste et ses
« militants » se gargarisent de « droits de l’homme », pendant
que le peuple argentin se meure un peu plus chaque jour : du covid 19, de
la misère, de la faim, du désespoir, de la répression qui s’est abattue sur lui
depuis des mois, du chaos et de la folie d’un confinement sans fin. Au pays des
droits de l’homme (pour quelques-uns), on meurt tous les jours un peu plus,
sous la violence, le chaos, la misère, livré à soi-même, sans défense. Les
juges eux, après une année harassante à lutter pour le maintien de leurs privilèges
exorbitants, seront bientôt en vacances, et pourront ainsi jouir de leurs biens
mal acquis, tandis que chaque jour qui passe les éloigne un peu plus de leur
serment. Quant aux montoneros et à leurs nombreux thuriféraires parmi les
membres du « justicialisme progressiste » au pouvoir, ils peuvent
s’enorgueillir de leur bilan : le pays compte aujourd’hui plus de pauvres
qu’il n’en a connu depuis 25 ans, et notamment chez les jeunes. Ces pauvres-là
ne comptent pas pour l’intelligentsia justicialiste au pouvoir. Ils ne
connaitront des droits de l’homme qu’un mot creux, vide de sens et de contenu, qui
n’aura fait qu’empirer leurs maigres conditions d’existence, et l’espoir d’une
vie meilleure. La multitude n’intéresse plus les révolutionnaires
embourgeoisés, dès lors qu’elle ne leur sert plus à conquérir le pouvoir.
Le 10 décembre dernier, pour commémorer le jour mondial des droits de
l’homme et terminer cette année 2020 en beauté, le Président et sa
vice-présidente ont acclamé les péronistes et les montoneros au cours d’un acte
officiel à l’ESMA[ii]. Tristes
tropiques. Ce pays du bout du monde est dirigé par des nostalgiques de la violence
politique, qui justifient leur action dans un discours mémoriel hémiplégique,
où les morts causées par les leurs ne comptent pas, tandis qu’ils persécutent
des vieillards guidés par le seul désir de vengeance. Leurs droits de l’Homme sont à géométrie variable, et l’absence
de la moindre déclaration pour condamner les élections indignes organisées par
le régime dictatorial du Venezuela aux abois démontre que leur
« logiciel » des années 70 n’a pas changé.
La violence politique qui gangrène ce pays depuis les années 60 n’a en
effet pas disparue, plus d’un demi-siècle plus tard. Elle se perpétue sous
couvert de justice, alors qu’elle n’est que vengeance aveugle, arbitraire et
persécution politique. Les prisons argentines sont devenues pour ces hommes
accusés illégalement de crime contre l’humanité les « prisons du
peuple », utilisées par les terroristes révolutionnaires des années 70,
d’où l’on ne ressortait pas vivant. Cela s’appelle aujourd’hui la lutte contre
« l’impunité gérontologique », selon la terminologie officielle du
Secrétariat d’Etat aux droits de l’Homme. Comment peut-on fermer les yeux et
accepter une telle barbarie au XXIème siècle ? Comment ne pas être indigné
de ces parodies de procès qui se déroulent sous la pression et les insultes des
« militants », et où chaque sentence est écrite à l’avance ? Combien
d’accusés sont libérés faute de preuve, après des années interminables de
détention provisoire destinées à les abattre physiquement et mentalement ? A
peine 10% d’entre eux. C’est quand même beau, un tel taux de condamnation, d'ailleurs à
l’opposé des résultats obtenus pour les délinquants de droit commun. Dès que l’un des détenus est en
passe de purger sa peine, il doit affronter comme par hasard une autre affaire,
une nouvelle accusation, et ainsi de suite (le plus âgé des prisonniers
politique -92 ans-, vient d’être condamné à perpétuité pour la 7ème
fois !). Compte tenu des simulacres
de procès où la défense ne peut poser la moindre question aux
« témoins » sous peine de les re-victimiser, où les parties civiles
ont tout le soutien de la machine étatique mise à leur service pour les aider à
« reconstituer leur mémoire », et où leur seule parole suffit 40 ans
après les faits pour vous condamner sans la moindre preuve, même quand la
partie adverse démontre qu’il s’agit d’un mensonge, on se demande bien comment
ils n’ont pas atteint les 100%. Sauf que cela n’a rien à voir avec la justice
et le procès équitable, mais tout avec l’arbitraire et une justice politique. Dernier
détail insolite, pour des accusations pénales aussi graves : ces procès de
la honte se déroulent maintenant par Zoom, ce qui permet d’en accélérer la
cadence, et d’améliorer ainsi les statistiques de condamnés pour satisfaire aux
demandes des « parties civiles ».
Pour le Président de Casppa France, la persécution absurde lancée contre
lui depuis 8 ans continue. L’association qu’il a fondé continuera sans relâche
à dénoncer ces injustices, jusqu’à obtenir sa libération et celle de tous les
prisonniers politiques accusés illégalement et injustement d’avoir commis dans
les années 70 des « crimes contre l’humanité ».
Casppa France,
15/12/2020.
[i] « Le ¨Procès »,
de Franz Kafka, a été publié sous le titre original « Der Prozess »
en 1925 à Berlin.