La stratégie des droits de l’Homme (DDH)
et démocratie de l’Union européenne (UE) vise à définir « les
principes, objectifs et priorités visant à améliorer l’efficacité et la
cohérence de la politique de l’UE dans ces domaines ». Comme toujours dans la communication de l’Union
européenne, les objectifs affichés sont ambitieux et “ronflants” : “Le Plan
d’action définit les priorités clés contribuant à un objectif commun : relever
les défis et bâtir une culture stratégique fondée sur les droits de la personne
et la démocratie, l’épine dorsale de sociétés résilientes. Protéger et
habiliter les individus Bâtir des sociétés résilientes, inclusives et démocratique”.
Logiquement, dans le plan d’action DDH et démocratie de l’UE pour l’Argentine,
le soutien au programme mis en place par le gouvernement de Nestor Kirchner de
pseudo “vérité, mémoire et justice” figure en bonne place.
Soucieuse de sa “diplomatie publique”
basée sur des personnalités issues de la “société civile” dotées d’une aura
médiatique forte, la délégation de l’Union en Argentine, suivie en cela par de
nombreux Etats membres, a développé des liens nombreux avec les représentants d’ONG
et du gouvernement Kirchner. Le soutien actif de l’Europe à cette politique
interroge. Pour quelles raisons ?
Soutenir une mémoire officielle hémiplégique
et mensongère comme celle que le gouvernement Kirchner a mis en place depuis
son arrivée au pouvoir en 2003 ne peut qu’alimenter de nouvelles dissensions
dans une société qui reste très divisée. Rouvrir plus d’un demi-siècle après les
faits des dossiers judiciaires qui conduisent devant la justice d’anciens militaires,
policiers, magistrats, ecclésiastiques, ou civils alors que les organisations
terroristes n’ont-elles jamais répondu de leurs crimes augurait déjà d’un
parti-pris arbitraire. Circonstance aggravante, lorsque de simples soupçons conduisent
à des condamnations à vie, et qu'une accusation
équivaut à la culpabilité, il n’y a plus de doutes sur les intentions réelles
suivies. Ces méthodes rappellent davantage la « loi des suspects » inspirée
par Robespierre sous la Révolution française, qui conduisait n’importe qui à l’échafaud,
que le droit international prôné par l’Europe et les organisations
internationales.
Ces postulats de départ conduisaient donc
à penser que cette politique ne pourrait que déboucher sur un désastre. Dans
les faits, 14 ans après sa mise en œuvre, le
programme « Vérité, Mémoire et Justice » s'avère une imposture : il a garanti l’impunité à d’anciens terroristes,
nié toute vérité historique pour imposer une mémoire officielle mensongère et partiale,
et consacré une justice politique d’exception, qui est la négation même des
règles et garanties du procès équitable. Ces procès, qui ont été déjà largement
commentés par Casppa France, sont l’antithèse même du concept de justice, que de
nombreux observateurs ont dénoncés, en vain jusqu’ici. Comment pourrait-il en être
autrement, un demi-siècle après les faits ? Ce programme n’a en réalité qu’un
seul objectif, celui de la vengeance. Voilà la réalité de la mascarade soutenue
par l’Union européenne.
Ajoutons que les organisations « de
droits de l’Homme » et les personnalités soutenues par l’Union sont en
majorité d’anciens terroristes ou militants de la lutte armée, qui se sont
reconvertis sans jamais avoir exprimé le moindre regret. A titre d’exemple,
citons le Président du CELS, Horacio Verbistky, accusé d’avoir participé à des
attentats mais jamais poursuivi pour cela
ou encore Hebe Bonafini, représentante éminente de l’organisation des grands-mères
de la place de mai, qui s’est réjouie ouvertement de l’attaque terroriste
contre les Tours jumelles de New York en septembre 2011.
La mémoire officielle argentine, reprise par l’UE, nomme ces anciens
terroristes des « jeunes idéalistes ».
Ajoutons que pendant que le pouvoir Kirchneriste
mettait en place ce programme au nom des « Droits de l’Homme », il
développait parallèlement une politique étrangère anti-occidentale et
anti-démocratique, développant des relations avec le Cuba de Raoul Castro, le Venezuela
de Hugo Chavez, ou encore l’Iran des mollahs, qui sont des modèles en la
matière comme chacun le sait, ce qui amena les Etats-Unis à prendre leurs distances
avec les Kirchner (administrations démocrates et républicaines confondues) mais
pas l’Union européenne.
Aujourd’hui, un an après le retour au
pouvoir de la famille Kirchner et de la Campora, quel est le bilan des droits
de l’homme et de la démocratie en Argentine ? Avec une vice-présidente qui
cherche à imposer à tout prix une réforme de la justice et le transfert des
juges qui sont en charge des (nombreux) procès ouverts à son encontre pour des faits
de corruption, il y a tout lieu de penser que la purge de la justice opérée soit
encore plus grave qu’en 2003. Mais d’autres faits alarmants sont à
mentionner
La revendication, le 7 septembre dernier, du terrorisme des années 70 par
les anciens montoneros, que Casppa
a dénoncé avec quelques voix courageuses ;
L’acclamation qui a été faite aux montoneros, lors d’une
cérémonie officielle au mois de décembre ;
La critique de la ministre de la sécurité Frederic à l’inscription
du Hezbollah comme groupe terroriste par l’ancien gouvernement
, argumentant que l’Argentine n’était en rien concernée par le terrorisme
L’ambiguïté des déclarations du gouvernement sur le « groupe
armé du peuple paraguayen », pourtant responsable de nombreux assassinats
et enlèvements ;
Le soutien apporté au régime vénézuélien, malgré le
rapport accablant de la commissaire des Droits de l’Homme des Nations-Unies concluant
en l’existence de crimes contre l’humanité et de nombreuses violations des
droits de l’Homme.
Le soutien apporté par le gouvernement au gouverneur de la province de
Formose, en place depuis 25 ans, alors qu’il est accusé d’atteintes
aux droits des minorités indigènes, dont les conditions de vie sont
déplorables, et d’atteintes graves à la liberté de ses concitoyens depuis le
début de l’épidémie sanitaire. La réaction du Secrétaire d’Etat aux Droits de l’Homme
de ce gouvernement a démontré une fois de plus l’instrumentalisation des droits
de l’homme qui est faite par ce gouvernement selon ses intérêts politiques, bien
loin des droits universels et indivisibles prônés par l’Europe. En réduisant ces
violations à des « faits isolés » et en accusant les auteurs de ces
dénonciations « d’intentions politique » par leurs réclamations, le
Secrétaire d’Etat des Droits de l’Homme argentin a démontré la considération partisane
et politique qu’il fait des DDH.
Ces faits sont publics, et la
représentation de l’Union européenne en Argentine comme de ses Etats membres ne
peut les ignorer. Ce ne sont pas des faits isolés, mais une posture politique assumée. La complaisance est une chose, et la complicité en est une autre. L’ambiguïté
vis-à-vis de régimes autoritaires n’est plus permise, tout comme celle qui
perdure autour du terrorisme. Il est grand temps que l’Europe cesse de soutenir
des organisations ou des personnalités qui ont commis ou revendiquent des
actions terroristes, et qui soutiennent des violations des droits de l’Homme
actuelles en Argentine ou ailleurs pour des raisons idéologiques ou partisanes.
Le soutien des Droits de l’Homme à géométrie variable doit cesser, et l’application
universelle doit être garantie et contrôlée par l’UE, incluant le respect des
droits des accusés de crimes contre l’humanité, et en premier lieu, celui d’un
procès équitable. Si comme le déclare le haut représentant de l'Union pour les
affaires étrangères Josep Borrell à Clarin,
l’indépendance de la justice est un pilier fondamental de la démocratie et doit
être placée en haut de l’agenda politique, il est impératif que cette intention
soit suivie d’effet dans les faits. L’Europe ne peut continuer à soutenir une
politique qui est ambiguë vis-à-vis du terrorisme, instrumentalise les Droits de l’Homme et les nie à une catégorie
de sa population, jugée par une justice politique digne des pires Etats
totalitaires.
Casppa France, le 1er février
2021.