De la défense des droits de l’Homme à la
dérive autoritaire.
Dans son article “El autoritarismo de
los pañuelos blancos”, publié le 19 janvier dernier, l'ex-ministre de la Culture de la ville de Buenos Aires et directeur artistique du Théâtre Colon Darío
Lopérfido décrit la lente dérive des organisations dites de défense des droits de l’Homme
en Argentine, qui sont passées d’un combat humaniste à une dérive autoritaire et
mafieuse que rien ne semble pouvoir arrêter (voir notre article du 28 mars 2019 à ce sujet).
Aujourd’hui seules ces associations sont élevées au rang de victimes officielles des années 70, les autres n’existent pas, surtout
lorsqu’elles sont le fait d’actes venant de leurs rangs. Le problème de ces
militants péronistes réside depuis toujours dans leur goût pour la violence politique
et la corruption, que l’on trouve encore aujourd’hui. Ces associations exploitent sans
vergogne leur « vérité », et démolissent tous ceux qui n’en font pas
partie. Même lorsqu’il s’agit de défendre des militants ou des responsables
politiques empêtrés dans des affaires judiciaires de détournement d’argent ou
de corruption. Leur idéologie est à géométrie variable, et bien entendu au
détriment des classes populaires, qu’elles prétendent pourtant défendre.
Georges Orwell |
C’est ce qui arriva à l’historien et philosophe
Tzvetan Todorov, et que rappelle fort à propos Dario Loperfido dans son article (lui même ayant souffert également d'ostracisme depuis ses déclarations sur la véracité du nombre réel de disparus).
Après avoir été opportunément invité à visiter le Parc de la mémoire et l’ESMA
en 2010, il a déclaré au grand dam de ces associations de « droits de l’homme »,
"qu'une société a besoin de connaître l'histoire, pas seulement avoir la
mémoire. Dans le cas argentin, le terrorisme révolutionnaire a précédé le
terrorisme d'État militaire et on ne peut pas comprendre l’un sans
l'autre." Il ajoutait également que : « La mémoire collective est
subjective : elle reflète les expériences de l'un des groupes constitutifs de
la société, de sorte qu'elle peut être utilisée par ce groupe comme un moyen
d'acquérir ou de renforcer une position politique ».
Lui qui avait tant souffert de la
barbarie communiste en Bulgarie avant de se réfugier en France, avait compris,
dès 2010, ce que cette construction mémorielle par l’une des parties prenantes
à un épisode dramatique recelait de danger et de risque d’instrumentalisation.
Il a bien entendu été immédiatement critiqué par ces militants
sectaires et fanatiques, qui n’ont pas compris la portée profonde de son message, et les
risques inhérents à cette instrumentalisation. En 2020, et au regard des faits, on comprend à
quel point celui-ci était prophétique, et comment la haine a rendu aveugle
ces militants !
Récemment, le philosophe français Michel
Onfray a publié “De la théorie de la dictature”, qui s’inscrit dans cette
filiation de Orwell. Revenant sur deux de ses ouvrages, “la ferme des animaux”
et “1984”, il y décrypte en quoi ils ont une portée qui va bien au-delà de leur
contexte historique et du totalitarisme soviétique de l’URSS, et fonctionnent non
seulement pour les dictatures passées mais aussi à venir. Onfray voit dans « 1984 »
les sept commandements qui constituent l’essence de la dictature :
-
Appauvrir la langue,
-
Abolir la vérité,
-
Supprimer l’histoire,
-
Nier la nature,
-
Propager la haine,
-
Aspirer à l’Empire.
Sa conclusion porte sur l’application
de ces principes au monde actuel. Incontestablement, si l’on met en exergue la situation
en Argentine à l’énoncé de ces principes, on ne peut que prendre Onfray au
sérieux et s’inquiéter que l’air du temps déjà passablement irrespirable n’y
devienne pestilentiel…
Liens vers les articles mentionnés :
https://www.infobae.com/opinion/2020/01/19/el-autoritarismo-de-los-panuelos-blancos/https://www.infobae.com/opinion/2020/01/19/el-autoritarismo-de-los-panuelos-blancos/